Le stade Yves-du-Manoir

Mis en ligne le 19 mars 2000 - Dernière mise à jour le 3 décembre 2023 - Temps de lecture : 4 minutes.

Le Racing évolue au stade Yves-du-Manoir de Colombes, enceinte mythique qui a accueilli les évènements du sport français pendant des décennies, mais qui a malheureusement beaucoup vieilli. Fief historique du Racing Club de France jusqu'au début du 21ème siècle, il a alors été vendu au Conseil Général des Hauts-de-Seine, qui l'a rénové quelque peu depuis. Il a surtout été retenu comme site pour les Jeux Olympiques de 2024, et va donc subir de gros travaux d'ici là, qui vont lui apporter une nouvelle jeunesse. Voici ce qu'il faut savoir sur ce stade qui est indissociable de l'histoire du football ciel et blanc, même s'il n'en est pas le berceau, et que l'équipe lors de son âge d'or professionnel n'y a (quasiment) pas joué ses matches.

La naissance

Les installations sportives de Colombes existaient depuis la fin du 19ème siècle, et le stade s'est appelé Stade du Matin à partir de 1907, avant d'être racheté par le Racing Club de France en 1920.

Son destin a changé dans les années suivantes : la ville de Paris s'étant vu attribuer l'organisation des Jeux Olympiques de 1924, elle devait se doter d'un "grand stade". A partir de 1921, les projets de construction les plus somptueux furent évoqués mais sans aboutir à rien de concret. De fait, aucune pierre n'était encore posée à treize mois des jeux, et le CIO menaça de retirer l'épreuve à Paris et pour la confier à Los Angeles. Il fût alors décidé dans l'urgence d'attribuer une subvention au Racing Club de France pour qu'il construise un stade sur ses installations, et c'est ainsi que naquît le stade tel qu'on le connaît aujourd'hui...

Il possédait à l'époque des tribunes de 45 000 places (capacité portée à 60 000 en 1938), une piste d'athlétisme et un terrain d'honneur. Rappelons aussi que plus qu'un stade, il s'agissait d'un véritable complexe doté d'une quinzaine de terrains. Il fût ultérieurement baptisé Yves-du-Manoir fin 1928, en hommage à un rugbyman du Racing décédé aux commandes de son avion durant l'été de cette même année.

Les événements

Le stade Yves-du-Manoir fût pendant longtemps, en plus d'une installation du RCF, un des hauts lieux du sport français, et en particulier du football hexagonal. Il accueillît ainsi les finales de Coupe de France de 1925 à 1971 (hormis les années 1938, 1940, 1965, 1966, 1967), avant que celles-ci ne se jouent dans l'actuel Parc des Princes puis désormais au Stade de France.

Vue aérienne du stade, dans les années 50...

Entre 1924 (France-Uruguay 1-5) et 1975 (France-Portugual 0-2), il reçût également des matches de l'équipe de France à 79 reprises, et enregistra à ces occasions plusieurs fois des affluences de plus de 60 000 spectateurs payants dans les années 50 !

Mais surtout, le stade de Colombes a accueilli en 1938 la finale de la 3ème Coupe du Monde (Italie-Hongrie 4-2), organisée cette année là en France. Il appartient donc au cercle très restreint des enceintes ayant eu cet honneur, où il côtoie entre autres le stade anglais de Wembley, le stade brésilien du Maracana, ou bien sûr le Stade de France.

Yves-du-Manoir et Racing-football

Le berceau de la section football du RCF à sa création ne se situe pas à Colombes, mais à Levallois (on y reviendra dans une autre article). Néanmoins les footballeurs ciels et blancs se sont installés à Colombes en 1908, et c'est donc de cette année que date le début de l'histoire entre ce stade et le club, pour les entraînements de l'équipe A, et l'accueil des équipes inférieures et de jeunes s'entend. Pour ce qui concerne les matches de compétition de l'équipe A, le Racing s'est en fait régulièrement détaché de son camp de base.

Ce fut le cas quelques saisons au début des années 20, puis surtout à l'époque du RC Paris des années 30 à 60, où l'équipe joua principalement au Parc des Princes pour faciliter l'accès du public (Yves-du-Manoir voyant quand même certaines rencontres quand le Parc n'était pas disponible). Ce fut à nouveau le cas quand Lagardère réussit à faire remonter le Racing en division 1 dans les années 80. En définitive, Colombes est le fief historique du Racing depuis plus de 100 ans, sauf pour les matches pro qui s'y sont très peu tenus. Notons aussi que le Matra Racing l'a quitté trois ans pour ses entraînements (équipe A), qui se sont basés à Rueil trois saisons à la fin des années 80.

Selon les moments, le Racing-football a joué ses matches sur le terrain dit Olympique depuis les JO de 1924, ou sur le terrain annexe Lucien Choine, construit juste avant les mêmes JO comme "terrain de football honneur", et rebaptisé après la seconde guerre mondiale en mémoire du président emblématique de la section football au début du vingtième siècle. Ce terrain, qui comportait une tribune de 1 000 places, a été détruit en 2022.

La vente au Département

La direction du Racing Club de France omnisports décida en 1998 de vendre le stade Yves-du-Manoir, dont l'entretien coûtait trop cher, et qui était devenu vêtuste - en témoignaient les trois quarts des tribunes du terrains olympiques qui avaient été détruites. Cette vente a été un serpent de mer pendant quelques années, avec plusieurs acquéreurs potentiels successifs dont les dossiers ont capoté pour des raisons variées : la fédération française de rugby, le Conseil Général des Hauts-de-Seine, les dirigeants du RC Paris de la période 1999-2002, puis un groupe immobilier (qui voulait le transformer en centre de loisirs !).

Finalement, c'est le Conseil Général qui remporta la mise depuis fin 2002, et qui est donc le nouveau propriétaire des lieux, qu'il continue de mettre à disposition du Racing-football et du Racing-rugby.

Le terrain olympique, qui faisait peine à voir depuis les années 90 avec la destruction de trois-quarts de ses tribunes, a subi un relifting avec notamment la remise en place de gradins métalliques côté Ouest, pour répondre aux besoins du Racing-rugby qui évoluait dans l'élite, mais était dans l'attente de la construction de l'Arena 92 à Nanterre où il a déménagé fin 2017.

Le présent et l'avenir

Le Racing-football est maintenant le seul résident du Stade Du Manoir (pour les matches), qui va avoir rendez-vous avec son histoire en 2024 en accueillant à nouveau les jeux olympiques, en l'occurence l'épreuve de hockey sur gazon.

Le stade va subir dans cette perspective des grands travaux en 2022-2023 qui vont grandement le transformer. Le terrain olympique va être transformé en un stade de 15 000 places, qui verra donc défiler les équipes de hockey qualifiées pour Paris 2024, mais qui est ensuite destiné à offrir une enceinte moderne pour le Racing-football. L'ensemble du complexe accueillera lui diverses installations liées au hockey (Fédération, CTN, terrain de 1 000 places), au football (4 terrains) et au rugby (3 terrains). C'est dans le cadre de ces travaux que le terrain Lucien Choine a malheureusement disparu...

Sources des informations : presse de l'époque avant les années 80 (ensuite, le parcours est contemporain de l'auteur).